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19 août 1913 : Adolphe Pégoud fait le grand saut

Revenons plus d'un siècle en arrière avec l'exploit humain (et industriel) d'un pionnier de l'aviation quelque peu oublié et qui réalise ce jour-là le premier saut en parachute depuis un avion… qu'il pilote.

 

UN AVENTURIER CONTRE TOUT GUERRIER

Si l'on attribue souvent à tort l'invention du parachute à Léonard de Vinci – ses prémices remontent à l'Antiquité – et si, à la fin du XVIIIème siècle, l'aérostier français André-Jacques Garnerin réussit plusieurs sauts depuis une montgolfière, il faut attendre 1912, le 1er mars très exactement, pour voir un homme s'élancer avec succès d'un avion. L'Américain Albert Berry saute ce jour-là au-dessus de Saint-Louis dans le Missouri. Un an après, le 21 juin 1913, c'est une femme, sa compatriote Tiny Broadwick, qui réédite cet exploit à Los Angeles. Néanmoins, tous deux ont été largués d'un appareil manœuvré par un pilote chevronné qui a ensuite ramené l'avion à bon (aéro)port. Ce qui ne présente guère d'intérêt dans le cas d'une avarie en vol qui obligerait les personnes à bord, et en particulier celles qui se trouvent aux commandes, à quitter d'urgence le navire. Or c'est cette préoccupation de sécurité qui pousse Adolphe Pégoud à réaliser son exploit ce 19 août 1913. A tout juste 24 ans.

Né le 13 juin 1889 au sein d'une famille iséroise d'agriculteurs, le jeune homme, qui rêve d'aventure, quitte les siens à 14 ans pour tenter sa chance dans la capitale. A 18 ans, il s'engage dans l'armée comme… cavalier, parcourant ainsi les paysages algériens et marocains avant de revenir dans la métropole. Il rencontre alors en 1910 un officier passionné d'aviation, le capitaine Louis Carlin. Les deux amis sont mutés à Satory, à côté de Versailles, où Adolphe effectue son baptême de l'air en octobre 1911. Nous sommes un an et demi seulement avant son exploit…

 

L'HOMME QUI TOMBE A PIC

Cet évènement est une vraie révélation. Libéré de ses obligations militaires en février 1913, il apprend le pilotage et obtient son brevet le 1er mars. Il est aussitôt engagé comme pilote d'essais par Louis Blériot lui-même ! Et c'est à bord d'un appareil de cette légende de l'aviation qu'il s'embarque seul le 19 août sur l'aérodrome de Châteaufort, dans les Yvelines, avec comme objectif de démontrer qu'un parachute peut sauver la vie d'aviateurs en difficulté. Il s'est associé pour la circonstance avec l'inventeur Frédéric Bonnet qui a mis au point un système fixé sur le fuselage pour lui permettre de s'extraire sans difficulté. Mais quelque peu tête en l'air, arrivé à 300 mètres d'altitude, il saute… en oubliant de couper le moteur ! Livré à lui-même, le vieil avion, sacrifié pour la circonstance, virevolte, pique, se retourne, remonte vers l'azur, le frôle au risque de l'entraîner dans sa course folle au gré de ses curieuses arabesques… avant de s’écraser finalement dans un champ et de permettre par la même occasion au jeune téméraire de retrouver sain et sauf le plancher des vaches.

Loin d'être calmé par la grosse frayeur qu'il vient de se créer, Alphonse Pégoud est convaincu par cet incident qu'un simple avion est capable d'effectuer des manœuvres inconcevables jusqu'à présent. Et c'est ainsi que quinze jours plus tard seulement, le 1er septembre, il réalise, en présence de Louis Blériot, le premier vol "tête en bas" de l’histoire… avant d'effectuer le 21 du même mois toute une série de figures acrobatiques s'achevant par l'un des premiers loopings jamais réalisés.

Des exploits qui lui valent une notoriété internationale, son nom seul suffisant à déplacer les foules à l'occasion des spectacles aériens dans lesquels il se produit. 

 

L'AS DES AS

Malheureusement, la vie de ce jeune homme aussi brillant que pressé sera dramatiquement écourtée. Mobilisé à l'occasion du premier conflit mondial, il devient en 1915, suite à plusieurs victoires et exploits éclatants, le premier "as" de 1914-1918. Il se voit décerner la Légion d'honneur et la croix de guerre… mais n'aura pas le temps de l'apprendre. Le 31 août de la même année, l'avion dans lequel il navigue seul se retrouve en effet nez à nez avec celui d'un caporal allemand, Otto Kandulski, qui n'est autre que l'un de ses anciens élèves, et de son mitrailleur. Lequel l'abat au-dessus de Belfort. Il avait tout juste 26 ans. En hommage à son illustre maître, le pilote germain reviendra sur les lieux une semaine plus tard lancer une couronne de laurier sur laquelle est inscrit "À Pégoud, mort en héros pour sa Patrie". Quelques mois plus tard, il sera lui-même abattu, mais aura la vie sauve. Ce qui vaudra tout de même à son vainqueur, Roger Ronserail, le surnom de "vengeur de Pégoud".

Après avoir eu les honneurs d'un transfert en grandes pompes à Notre-Dame en octobre 1920, le corps d'Adolphe Pégoud repose désormais au cimetière du Montparnasse à Paris. Quant à son parachute embarqué, après quelques améliorations complémentaires, il est devenu un élément incontournable de tout voyage en avion et a fait la fortune de ses manufacturiers !

 

"La culture, c'est comme un parachute : quand on n'en a pas, on s'écrase" – Pierre Desproges

 

ÇA S'EST AUSSI PASSÉ CETTE SEMAINE :

- 17 août (1861) : pour la première fois en France, une femme devient bachelière
- 17 août (2016) : en Angleterre, le plus gros aéronef du monde, l’Airlander 10, prend son premier envol
- 19 août (1931) : le Suisse Auguste Piccard monte en ballon à plus de 16 000 mètres
- 19 août (1960) : lancement de Spoutnik 5, lors duquel plusieurs dizaines animaux deviennent les premiers à être placés en orbite spatiale, puis ramenés vivants
- 20 août (1858) : Charles Darwin présente sa théorie de l’évolution dans The Journal of the Proceedings of the Linnean Society of London
- 20 août (1968) : le prototype du Concorde effectue ses premiers essais de moteurs
- 20 août (2018) : la NASA confirme la présence de glace d'eau sur la Lune
- 23 août (1962) : l'édition internationale du New York Times contient pour la première fois un article de 5 000 mots transmis de New York à Paris par le satellite Telstar-I

Le 18/08/2021