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Pourquoi et comment passer votre modèle économique au 4.0

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l'industrie du futur sans jamais oser le demander ! A travers cette nouvelle rubrique, Global Industrie fait le point pour vous sur les grands thèmes de l'industrie 4.0.

En pleine quatrième révolution industrielle digitale, de nouveaux modèles économiques se développent. Avec eux, de nouveaux services à forte valeur ajoutée exploitant le numérique (télémaintenance, monitoring à distance, télédépannage) sont proposés. Associés à un modèle de facturation à l’usage, ces nouveaux modèles économiques permettent de fidéliser les clients et de réduire l’impact sur l’environnement. Pourquoi et comment les mettre en place dans votre entreprise ? 

Une keynote, donné le 5 mars dernier sur Global Industrie Lyon par Viet Long Duong, Architecte Industrie du Futur et Transformation des Entreprises au Cetim, et Cosette Jarnouen, de la société N2C, vous apporte des réponses à travers l'exemple de cette entreprise spécialisée dans les machines pour le travail du métal, résolument engagée dans l'économie circulaire et l'industrie du futur.

 

 

PREMIERE ETAPE :  REALISER UN ETAT DES LIEUX 

 

 L'EXEMPLE N2C  - Afin de faire évoluer son business model, N2C est partie, avec le Cetim, de l'analyse élaborée par LE spécialiste de la question, le professeur d'Harvard Michael Porter. L'entreprise a réalisé, en s'appuyant sur les 5 forces* que ce dernier a identifiées, un état des lieux de son environnement concurrentiel et distingué les personnes susceptibles d'influer sur ses performances et ses bénéfices. Elle a également analysé les attentes de sa clientèle et de son segment de marché, tout en tenant compte des différentes réglementations en cours.

 MORALITE  – Pour passer votre modèle économique au 4.0, vous devez réaliser un état des lieux dans votre entreprise : identifier ses domaines d'activité stratégiques, réaliser un SWOT** pour connaître ses forces et ses faiblesses, caractériser sa politique et sa stratégie de mise en œuvre, et interroger les services en contact avec les clients (achats, SAV, marketing, bureaux d'étude, production…). Il faut le compléter par une enquête menée auprès des clients (étude de marché, enquête de satisfaction, attentes complémentaires…) et par une observation rigoureuse des différentes parties prenantes (analyse de la concurrence, relations avec les fournisseurs, administrations, collectivités, ONG…). 

 

DEUXIEME ETAPE :  SE POSER LES BONNES QUESTIONS 

 

 L'EXEMPLE N2C  - L'enquête réalisée en 2017 à permis d'identifier des forces, au premier rang desquelles la confiance de ses clients, une vraie reconnaissance de son savoir-faire technique et de son offre en équipements robustes, ainsi qu'un bon positionnement de ses prix. Elle a aussi fait ressortir des axes d'amélioration, en particulier la nécessité d'accroître sa productivité, de professionnaliser sa formation et d'améliorer la certification de ses équipements. Enfin, elle a mis en exergue deux opportunités : une véritable attente des clients en matière de nouveaux services à valeur ajoutée et leur pragmatisme, ceux-ci étant prêts à considérer une facturation à l'usage s'ils y voient un réel intérêt. Ces résultats ont conforté N2C à la fois dans sa réflexion sur le bien-fondé de l'évolution que l'entreprise envisageait et dans sa connaissance du terrain.

 MORALITE  – Les deux grandes questions à vous poser lorsque vous souhaitez faire évoluer votre modèle économique sont de savoir quelles sont d'une part les limites de votre modèle actuel et d'autre part les raisons d'en changer. Ces dernières peuvent être diverses : concurrence trop forte, prix tirés vers le bas, variabilité et faible visibilité du secteur, accès à de nouveaux marchés et segments de clientèle, nécessité de fidéliser les principaux clients, création d'une offre disruptive, difficultés à valoriser certains services…

Pour réaliser cet état des lieux, il est possible d'utiliser le business model Canvas en vous demandant tout d'abord qui sont vos clients, quelle proposition de valeur vous leur faites, quel type de relation vous avez mis en place avec eux, quels sont vos canaux de distribution et quels revenus vous en dégagez. Une fois les réponses à ces questions apportées, il faut vous demander quels sont vos activités-clés, les ressources indispensables dans votre entreprise et vos partenaires centraux pour réaliser votre proposition de valeur. Sans oublier de vous interroger sur la structure de coût, en se demandant notamment s'il est nécessaire de beaucoup investir avant de satisfaire votre premier client. 

Pour chacune des réponses apportées, il faut vous demander ce que vous pourriez faire évoluer pour modifier, en l'améliorant, votre modèle économique. 

 

TROISIEME ETAPE :  UNE NOUVELLE FACTURATION EN FONCTION DE L'USAGE 

 

 L'EXEMPLE N2C  – Suite à ces réflexions, l'entreprise est parvenue à proposer une offre globale à ses clients autour des machines qu'elle produit en incluant en complément des services de maintenance et de télémaintenance. Elle a amélioré sa réactivité et est désormais capable de répondre à de nouvelles problématiques industrielles. Ce nouveau modèle économique permet aussi d'avoir une véritable vision de la structure des coûts et de mettre en place des contrats de services et des modalités de facturation très simples, flexibles et adaptées au type d'entreprise et aux besoins du client : cela peut être un loyer fixe, à l'usage (en rapport aux heures de fonctionnement), aux résultats ou aux performances (en fonction des pièces produites). 

 MORALITE  – Il convient de définir avec votre client une unité de référence de l'usage ou de l'usure de l'équipement ou de l'offre que vous lui proposez selon son cahier des charges. Cela peut être un temps d'utilisation, un nombre de produits, un cycle de production, une performance ou un résultat attendus… Une fois cet indicateur défini, vous pouvez fixer un loyer qui variera en fonction de lui, d'un minimum (pas d'utilisation, mais intégrant les coûts d'installation et de formation notamment) à éventuellement un maximum, via des paliers d'usage (normal, fort, intensif) traduisant l'usure (normale, prématurée, excessive) dans le cas d'une machine, et donc une nécessité plus fréquente de maintenance. On se trouve ainsi dans l'offre MaaS : Machine as a Service.

 

EN CONCLUSION :  UN NOUVEAU BUSINESS MODEL GAGNANT-GAGNANT 

Ce nouveau service de paiement à l'usage et de loyer est bénéfique pour tous. 

Il permet à l'industriel d'éviter un investissement lourd et de s'endetter, tout en prévoyant les coûts en fonction de son chiffre d'affaires. Le droit à l'erreur lui est également permis : s'il a vu trop grand ou trop juste sur les dimensions ou la capacité de la machine, son fournisseur, en l'occurrence N2C, pourra lui proposer une machine de remplacement. Il sera également à ses côtés pour gérer la fin de vie de l'appareil. 

Pour le prestataire, c'est aussi du gagnant-gagnant : ce système permet de planifier et de gérer plus efficacement la maintenance des appareils et de réduire les risques de casse, d'arrêt de production ou de pièces de piètre qualité. Il ne faut pas non plus occulter l'aspect environnemental. Le projet de N2C a ainsi été financé par l'ADEME dans le cadre des programmes d'investissements d'avenir, entraînant une démarche d'éco-reconstruction de la machine concernée avec une réduction de sa consommation énergétique de 64%. Jusqu'à 94% de la masse de l'ancienne machine peut être réutilisée. Il s'agit donc véritablement d'économie circulaire, ce qui a valu à ce projet l'un des trois prix qu'il a remportés, l'un des deux autres récompensant un business model innovant !

 

* Selon Michael Porter, cinq forces déterminent la structure concurrentielle d'une industrie de biens ou de services : le pouvoir de négociation des clients, le pouvoir de négociation des fournisseurs, la menace des produits de substitution, la menace d'entrants potentiels sur le marché et l'intensité de la rivalité entre les concurrents (source Wikipédia).
** Outil permettant de déterminer les options offertes dans un domaine d'activité stratégique qui vise à préciser les objectifs de l'entreprise ou du projet et à identifier les facteurs internes et externes favorables et défavorables à leur réalisation (source Wikipédia).

Remerciements particuliers à Viet Long Duong, Architecte Industrie du Futur et Transformation des Entreprises au Cetim, et Cosette Jarnouen, de la société N2C.

Le 18/12/2019